Cinq employés se retrouvent subrepticement, presque clandestinement, pour, au cours d'une pause partager quelques mots. Suspendus aux lèvres d'un des leurs, ils écoutent et (re)découvrent un texte puisé dans un ouvrage soigneusement choisi. Peu importe la forme, ce qui compte, c'est l'échange. Favorisée par une mise en espace réduite à son plus strict minimum, l'écoute que fait naître le dispositif sert d'écrin à toute une série de textes très différents mais invitant à chaque fois à une plongée dans un style, un genre ou une démarche singulières et accrocheuses. De Jacques Prévert à Annie Ernaux, le paysage mental des auteurs et des acteurs se déploie sur scène avec une belle diversité, créant des parallèles entre les époques (l'arrivée de Mitterrand au pouvoir et la situation actuelle) ou les approches.

Sur scène, Dominique Sarrazin et ses complices (Catherine Gilleron et Annick Gernez) répondent à Thomas Piasecki et Christophe Carassou. Croisement de générations et d'auteurs, le spectacle met également en scène des artistes d'âge différents, aux préoccupations dissemblables. Chacun à leur manière, les textes finaux de Dominique Sarrazin et Thomas Piasecki participent de sensibilités singulières mais d'une démarche commune : celle de faire du théâtre un lieu en phase et en prise avec le monde, de la scène une agora où débattre des soubresauts de la société, des acteurs des porte-paroles des grandes voix du monde pour en discuter avec le public. Ce théâtre là ne manque ni de pertinence, ni de sel, surtout quand il met en lumière la variété et la richesse de textes classiques comme contemporains et redonne, à sa façon, le goût de la lecture et de l'engagement.